بسم الله الرحمن الرحيم
La satisfaction qu’on peut avoir du Décret d’ALLAH ﷻ ne passe pas nécessairement par la joie — bien au contraire : on peut être frappé par Une Décision d’ALLAH ﷻ Qu’on accepte pleinement et Dont on se satisfait (parce qu’on a la certitude qu’Elle est La Meilleure pour nous), mais qui nous affecte profondément sur le plan du mental ; qui nous rend triste.
Perdre un enfant, par exemple, ne peut bien évidemment pas susciter la joie, ni même l’indifférence : ça ne peut que rendre profondément triste (pourvu qu’on soit normalement constitué et équilibré) ; mais ça n’est pas pour autant que ça empêche le croyant d’être satisfait d’ALLAH ﷻ, car comprendre et accepter Le Décret d’ALLAH ﷻ, s’En satisfaire, relève avant tout d’un effort intellectuel qui résulte d’une foi préalable : c’est d’abord parce qu’on a cru qu’on peut ensuite tenir ce raisonnement qui transcende l’émotion première, la transforme ; et là réside toute la différence entre le croyant et le mécréant, qui n’a pas dans le cœur la foi nécessaire pour transformer l’émotion négative en satisfaction (et donc en apaisement relatif, et surtout en Proximité d’ALLAH ﷻ), qui la laisse donc l’emporter dans une cascade d’émotions secondaires, dans des sentiments tout aussi négatifs comme la révolte, ou la colère, ou le ressentiment… — et qui surtout s’éloigne d’ALLAH ﷻ, que ce soit par l’insatisfaction de LUI, par une rancune clairement orientée et exprimée contre LUI (dans le cadre de la conscience négative du Divin), ou que ce soit tout simplement par la chute de l’état spirituel qu’induisent tous ces sentiments négatifs ; c’est donc bien parce qu’il y a la foi (donc ALLAH ﷻ, car c’est ALLAH ﷻ Qui donne la foi) qui s’interpose entre l’homme et son émotion (donc entre l’homme et son cœur) qu’il y a l’effort qui permet la satisfaction d’ALLAH ﷻ (la foi préexiste dans le cœur, puis arrive l’épreuve et l’émotion, puis se fait l’effort intellectuel d’acceptation sur la base de la foi, puis se produit la satisfaction — mais la satisfaction ne saurait advenir directement sans l’effort, car c’est l’inévitable émotion qui le rend nécessaire) : d’abord ALLAH ﷻ est Satisfait de Son Serviteur, alors Il lui donne la foi, et par cette foi Son Serviteur est à son tour satisfait d’ALLAH ﷻ (conformément au verset qui établit que c’est forcément ALLAH ﷻ Le Premier Satisfait : « ALLAH ﷻ les agrée, ET ils L’agréent » — sans quoi le serviteur ne pourrait être satisfait à son tour) ; quoiqu’il en soit, la satisfaction ne peut découler directement, pour le croyant, de l’émotion (c’est-à-dire sans foi préalable à l’émotion et sans effort intellectuel consécutif), ne saurait y être subordonnée : car si on peut comprendre qu’une émotion positive provoque reconnaissance et satisfaction, il paraît peu probable, à moins d’être masochiste, qu’une émotion négative puisse spontanément provoquer la satisfaction ; ça n’est donc pas l’émotion en soi qui détermine la satisfaction, ni même la foi seule, mais bel et bien la foi préalable ET l’effort intellectuel consécutif (une foi faible sans l’effort n’aboutit pas à la satisfaction : on peut parfaitement concevoir et entendre qu’une foi trop faible soit surpassée par une émotion trop forte, et ne trouve donc pas les ressources nécessaires à la production de l’effort — et c’est souvent le cas des femmes qui se laissent submerger par leurs émotions, étant plus faibles que les hommes, en règle générale, sur le plan de la foi, et qui ne parviennent pas à produire l’effort de satisfaction).
Si l’émotion ne fait pas directement la satisfaction, elle est toutefois un rouage nécessaire du processus de satisfaction, car l’être humain est programmé pour éprouver des émotions particulières à des moments et lors d’événements particuliers, et l’émotion est la condition de l’effort intellectuel de satisfaction qui vient obligatoirement compléter la foi préalable et la confirmer : autrement dit, sans émotion, pas d’effort (de Jihad) pour la transformer en satisfaction — et donc pas de satisfaction (donc, au final, pas de satisfaction sans émotion intermédiaire : il faut nécessairement que s’intercale, entre la foi et la satisfaction, une émotion et donc une épreuve) ; et il va de soi que l’émotion participe tout autant du processus de non satisfaction et d’éloignement d’ALLAH ﷻ que du processus de satisfaction et de rapprochement, car comme elle détermine l’effort, elle détermine également le non effort, et donc les sentiments négatifs de l’égarement (colère, révolte, ressentiment, rancune, sentiment de déréliction…) qui découlent fatalement de l’émotion faute de Jihad ; et on commence à comprendre pourquoi ALLAH ﷻ a fait de l’homme un être émotif — car c’est via l’émotion que se révèle le degré de foi ou de mécréance.
Ainsi, pour récapituler : pas de satisfaction (ou de non satisfaction) sans effort (ou non effort) ; pas d’effort sans foi forte — mais pas d’effort non plus (ou de non effort) sans émotion : ainsi, avec ou sans foi, dans tous les cas de figure, c’est bien l’émotion qui détermine l’effort ou le non effort (on a vu que même une foi préalable pouvait ne pas donner lieu à l’effort si elle était faible), la satisfaction ou l’égarement. (Et on comprend la rudesse de Sayyidina ʿUmar رضي الله عنه quand il s’agissait de brider l’émotion des femmes en cas de décès, et de faire en sorte qu’elle s’exprimât dans la retenue et la dignité, sans cris ni manifestations excessives — c’est-à-dire avec tous les signes de l’acceptation : d’une certaine manière, il imposait l’effort et de satisfaction, ne serait-ce que dans la forme et les apparences — car le corps doit souvent précéder l’esprit, au moins pour les faibles : faire les gestes de l’amour, par exemple, peut aider à faire naître l’amour, et Sayyidina ʿUmar, qui connaissait parfaitement cette règle, se disait qu’imposer les gestes de la satisfaction — ou du moins de l’acceptation qui y introduit — pouvait provoquer la satisfaction du cœur.)
Et dans le cas de la perte d’un enfant (pour revenir à ce cas de figure), non seulement l’émotion ouvrira au croyant doté d’une foi solide la porte de l’effort en vue de la satisfaction, mais encore cette émotion, cette tristesse infinie, donnera toute sa valeur à la patience qui découle de la satisfaction (seule la satisfaction, par l’acceptation, rend possible la patience dont elle est le signe, quand le mécontentement, le refus, la frustration entraînent l’agitation, la désobéissance, la rébellion, la révolte) ; car il n’y aurait aucun mérite à endurer le décès d’un enfant dans l’indifférence, la froideur, l’absence d’émotion — et même ça relèverait de l’anomalie, de la pathologie : au contraire, c’est bien la tristesse, le chagrin, la peine, qui font que la patience est si louable et méritoire.
Donc, celui qui prétend que la tristesse est inutile voire néfaste, n’a pas compris l’ordre des choses tel que l’a établi ALLAH ﷻ (et Ibn Taymiyya lui-même reconnaît dans son œuvre la nécessité de la tristesse).
Et nous affirmons, nous, ici, que la tristesse et les émotions participent pleinement de l’acceptation et de la satisfaction (par l’effort en ce sens qu’elles impliquent), puis de l’endurance (qui ne saurait être sans elles car elles en sont la nécessaire condition — pas de patience possible sans chagrin), et qu’elles témoignent dans tous les cas du degré de foi (selon qu’elles provoquent l’effort de satisfaction, ou des sentiments de rébellion et de mécréance).