بسم الله الرحمن الرحيم
Le Dhikr ne se peut pratiquer que dans le Nasut, qui correspond à l’état d’éveil total et de pleine conscience.
Et même, le Nasut n’a été créé qu’à cette fin : évoquer ALLAH ﷻ en conscience.
Car c’est à partir de cette évocation éveillée que l’esprit peut s’élever et traverser tous les mondes intermédiaires jusqu’aux Domaines Divins : le Dhikr éveillé est le déclencheur de l’élévation spirituelle.
Et à force de pratiquer le Dhikr en état d’éveil, on finit par le pratiquer mécaniquement dans les états d’inconscience — ce qui n’est jamais que le but final : évoquer ALLAH ﷻ dans tous les états, de manière automatique : à terme, l’esprit ne doit plus être occupé qu’à ça, en tous lieux, en tous temps, en toutes occasions, et dans tous les états possibles et imaginables.
Et tant que les états d’inconscience mènent à autre chose qu’à l’évocation d’ALLAH ﷻ, c’est qu’on ne pratique pas vraiment le Dhikr.
Mais pour en arriver là, il faut déjà pouvoir le pratiquer en état d’éveil, de manière forcée, avec la langue — et ça ne s’initie que par l’intermédiaire du Murshid dont c’est la vocation.
Ainsi, le premier niveau de Dhikr est celui qui se pratique avec la langue et/ou en comptant sur les doigts : le corps participe et est pleinement éveillé, et l’éveil total se caractérise par le sens de la vision, Al-Basar : dès que les yeux sont ouverts et que le sens de la vue est actif, on est techniquement éveillé ; le Dhikr plus approfondi, ou second niveau de Dhikr, se pratique quant-à lui en fermant les yeux, c’est-à-dire en occultant Al-Basar, auquel va progressivement se substituer Al-Basira au fur et à mesure que l’esprit va s’élever, au-delà du Nasut, dans le Malakut, le Jabarut, et encore au-delà dans Les Domaines Divins ; à terme, l’esprit éteint qui aura atteint la station de la permanence (Al-Baqa) dans Les Domaines Divins, n’aura plus besoin de pratiquer le Dhikr dans le Nasut, il SERA le Dhikr, il sera Ce Qu’il évoque dans L’Unicité (At-Tawhid) : car, aussi paradoxal que cela puisse paraître, le Dhikr éveillé, en conscience (forcé), est la pratique des oublieux, des Ghafilun, qui leur sert justement à compenser leur état d’oubli ; mais vu que le Dunya est la station de l’oubli et du voilement, il implique nécessairement un Dhikr compensateur : ainsi doit-on s’y attacher à pratiquer un Dhikr de retour, de jonction, de réunification — et c’est là le cheminement (As-Suluk) dans la voie initiatique du Murshid (dans la Tariqa) ; car à ce stade le Dhikr n’est pas naturel : il n’est pas inhérent, intrinsèque, mais « extérieur/externe », détaché de l’esprit qui doit s’y efforcer — se forcer à le pratiquer.
C’est ainsi que, dans le Nasut, il y a ceux qui « font » le Dhikr (ou qui DOIVENT le faire : les Ghafilun, les voilés) ; et il y a ceux qui SONT le Dhikr, que « fait » le Dhikr (les Permanents en ALLAH ﷻ) ; mais l’un dans l’autre, tout part du Nasut, du Dunya, qui est le stade de l’oubli matériel où on doit pratiquer un rappel matériel pour compenser cet oubli incontournable, inévitable.
Et quand on dit « Dhikr », et qu’on affirme qu’il ne se peut pratiquer que dans le Nasut, on entend bien cette pratique forcée compensatrice, cet effort à produire — ce Jihad pour revenir à l’état de Fitra originel ; et c’est ainsi que le monde matériel est la dimension de l’effort, par le voilement et l’oubli qu’il implique : en d’autres termes, il ne nous fait oublier que pour nous obliger à produire l’effort du rappel (mais une fois amorcée la pompe du rappel, une fois la permanence atteinte, l’effet d’oubli du Dunya s’inverse, et tout nous y rappelle invariablement ALLAH ﷻ avec insistance, de manière irrépressible.)